Madame Arena a rendu publique, la semaine dernière, son évaluation personnelle du désormais célèbre décret « Inscriptions ». Une évaluation pour le moins partielle qui escamote des données, prend des libertés avec la logique causale et aboutit tout naturellement à des conclusions simplistes et éminemment discutables. Tant pour ce qui concerne la réalité spécifique du Brabant wallon qu’à propos de la pertinence du dispositif légal.

Deux nouvelles écoles en BW : la solution-miracle ?

Il y a quelques mois, le Ministre Antoine nous servait son élixir garanti anti-files en Brabant wallon : créer trois nouvelles écoles secondaires. A grand renfort de chiffres (repris aujourd’hui sur son blog, il n’y a rien de meilleur qu’une soupe qu’on réchauffe), le Ministre y allait d’un de ces raisonnements à la logique implacable dont il a le secret : le nombre d’élèves dans le secondaire a davantage augmenté dans le Brabant wallon qu’ailleurs, la taille des établissements secondaires y est 20% plus importante qu’ailleurs, et il y faut plus d’élèves pour dédoubler des classes (ce dernier raisonnement demeure aujourd’hui encore totalement incompréhensible pour tout technicien de l’enseignement qui se respecte, mais passons…).
_ CQFD : il n’y a pas assez d’écoles secondaires en BW.

Madame Arena, aujourd’hui, a allongé le sirop, mais la recette de base est restée la même : non plus trois, mais deux écoles. Son constat ? Un global manque de places sur la province. Et on attend toujours les chiffres…

Une conclusion à démontrer, des données à affiner

Deux nouvelles écoles sur la province résoudraient-elles le problème du secondaire en Brabant wallon ? Si une étude sérieuse le prouve, nous serons les premiers à applaudir leur création. Et autant le dire tout net, nous ne disposons pas – et pour cause, puisque ceux qui devraient les produire ne semblent guère en disposer non plus – des données chiffrées autorisant les affirmations péremptoires. Mais qu’observe-t-on sur le terrain :

-*que s’il y a des listes d’attente dans un certain nombre d’écoles, tous réseaux confondus, il y en a aussi qui disposent encore de places ;

-*que globalement, il y a encore des places dans le libre et dans l’enseignement provincial, et que rien n’indique qu’il n’y en ait plus dans le réseau de la Communauté française ;

-*que les inscriptions multiples, dont le nombre a augmenté substantiellement suite à la panique créée par le décret « Inscriptions », ont un effet non négligeable sur l’ampleur des listes d’attente et faussent évidemment la perception de la réalité.

Bref, la réalité de ce « manque de places » est tout, sauf simple à appréhender. Pire : rien ne prouve que la création de deux nouveaux établissements en BW va résoudre plus de problèmes qu’elle ne va en générer. Car comment peut-on assurer que d’éventuelles nouvelles écoles vont simplement absorber les listes d’attente des écoles trop pleines, et non puiser dans le réservoir des écoles qui sont loin d’être remplies ? Et par voie de conséquence, ne va-t-on pas exacerber la concurrence stérile entre écoles et entre réseaux ?

Des investissements lourds

Les infrastructures de deux nouveaux établissements, c’est plusieurs millions d’euros. Il y a intérêt à bien réfléchir avant, dans le contexte général des bâtiments scolaires. Le paradoxe risque en effet d’être difficile à digérer pour pas mal d’écoles qui peinent à entretenir leurs bâtiments et auxquelles on promet depuis des années un « partenariat public-privé » aux allures d’Arlésienne.

A propos de certaines rumeurs

Prudente, Madame Arena a précisé que, plutôt que de la création d’écoles, il pourrait s’agir d’extensions d’écoles existantes. Et d’aucuns de s’interroger. Et si derrière les grandes déclarations ne se cachaient que la concrétisation de deux projets déjà anciens : l’attribution d’un numéro matricule à une école du réseau libre (ce qui serait certes bienvenu, mais ne créerait aucune nouvelle place) et la réalisation d’une construction sur Louvain-la-Neuve dans le réseau de la Communauté française (qui est attendue depuis 1998). Si tel était le cas, bien sûr, la donne s’en trouverait quelque peu modifiée. Mais ce n’est plus d’effet d’annonce qu’il faudrait alors parler, c’est carrément d’escroquerie médiatique.

Une étude chiffrée…et l’examen des vrais problèmes

Dans le Brabant wallon comme ailleurs, il faut éviter les solutions-gadgets. La file d’attente fait mauvais genre (surtout en année pré-électorale) ? Vive l’embouteillage virtuel sur le Net. La suppression l’an prochain des conventions avec des écoles primaires n’est pas très populaire ? Qu’à cela ne tienne, on va en autoriser deux plutôt qu’une…mais la deuxième sera une école « défavorisée ».

La politique du « sauve qui peut » du Cabinet Arena, non contente d’aboutir à la promotion de solutions bancales, en finit par éluder les véritables problèmes. Car où donc est-elle encore, cette recherche de mixité sociale qui anoblissait ce décret « Inscriptions » bancal depuis le début ?

Dans le Brabant wallon comme ailleurs, les vraies questions méritent d’être posées. Comment faire pour repeupler le premier degré des établissements qui organisent de l’enseignement qualifiant ? Est-il normal que les voisins d’une école ne puissent y inscrire leur enfant, parce qu’ils sont trop loin dans la liste d’attente ? La seule chronologie constitue-t elle une garantie d’équité entre parents ?

Ecolo est demandeur de ce débat. Mais il est aussi demandeur d’une étude rigoureuse sur le Brabant wallon, prenant en compte les données des différents réseaux, préalablement à tout projet de création d’école secondaire.

Pour éviter que l’effet d’annonce n’engendre la gabegie.